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Vous avez, à la suite du Président de la République, souligné la volonté de votre gouvernement de s'attaquer, pendant la présidence française du G8 et du G20, aux racines des déséquilibres internationaux qui bouleversent en profondeur toutes nos structures économiques et sociales.
Le Président de la République a été très clair le 16 novembre : « il faut protéger les gens. On ne peut plus vivre dans un monde sans régulation. C'est la vocation de la France de porter le discours de la régulation ».
La crise de 2008 a révélé la faillite d'une libéralisation sans limites et le rôle irremplaçable des Etats. Dans l'urgence, mais sans traiter les problèmes de fond, ils ont empêché la débâcle du système financier international et inventé le G20, qui doit désormais les traiter.
Il s'agit bien de corriger les désastres entraînés par l'idéologie de la dérégulation, triomphante depuis les années 1970, et dont l'Europe a été la première victime. Elle a pris de plein fouet la conjonction de l'émergence des nouvelles puissances du Sud Est asiatique et des effets économiques et sociaux de la dérégulation. Elle est donc intéressée au premier chef par la correction de trajectoire à laquelle va s'atteler la présidence française.
Dans les trois domaines principaux où celle-ci est appelée à intervenir, la situation se présente différemment. La régulation du système financier mondial est en marche depuis le sommet de Pittsburg. L'idée de récréer un système monétaire international gagne du terrain. En revanche, la réforme du système du commerce international se heurte encore à d'importantes résistances idéologiques.
S'agissant du système financier mondial, la faillite de Lehman Brothers a conduit à une révision déchirante du mouvement de libéralisation systématique lancé dans les années 1980, remplacé par un processus de remise en ordre des marchés. Un certain nombre de pas ont été accomplis : beaucoup de progrès restent à faire, notamment pour soumettre les énormes transactions de gré à gré à la surveillance de régulateurs fiables. Beaucoup reste à faire, mais le processus est enclenché.
En ce qui concerne la réforme du système monétaire international, avec beaucoup de courage et peut-être de témérité, le chef de l'Etat et votre gouvernement entendent en faire la priorité de la présidence française. Là également, il s'agit d'introduire un changement de cap radical par rapport à l'idéologie de la non régulation, au non système monétaire international dans lequel nous vivons – mal – depuis 1971 et la fin de la convertibilité du dollar en or. Là encore, c'est l'Europe qui pâtit le plus de l'effet de ciseau entre une surévaluation tendancielle de l'euro et une sous-évaluation recherchée du dollar et du yuan. Nous sommes les témoins quotidiens des efforts héroïques de nos entreprises pour dégager des marges de productivité qui sont aussitôt annihilées à l'export par l'écart euro-dollar.
Le sommet de Séoul a commandé au FMI des analyses. A partir de là, il faudra que le gouvernement français porte des propositions audacieuses, par exemple l'idée d'un serpent monétaire international limitant les fluctuations entre devises, dont la France avait été le promoteur en Europe avec le SME.
Il faudra, si l'on veut réellement avancer, que l'Europe mette de l'ordre dans sa propre maison. Cela implique de modifier substantiellement la gestion de l'euro pour l'adapter à l'hétérogénéité des Etats membres, en reconnaissant que l'euro ne correspond pas à une zone monétaire optimale. Cela implique également de définir un nouveau système monétaire européen coopératif pour associer les autres devises ayant cours dans l'Union européenne.
Sans cela, l'Europe restera une zone d'instabilité monétaire, ce qui affectera évidemment sa crédibilité en tant que porteur de réforme.
Enfin, s'agissant de la nécessité de revenir sur la dérégulation du commerce international, là des résistances idéologiques demeurent, en particulier au niveau des institutions européennes. Le libre échangisme naïf qui a amené les Européens à se faire les avocats inconditionnels des accords de Marrakech reste encore prégnant, malgré leurs effets dévastateurs sur notre tissu économique.
Ailleurs, les esprits ont davantage évolué. Les Etats-Unis n'ont plus le déficit heureux. Ils ont même proposé à Séoul son plafonnement, ainsi que celui des excédents des comptes courants : une proposition sans doute difficile à mettre en œuvre, mais l'idée est lancée.
Il a été décidé à Séoul de définir des instruments de mesure pour parvenir à un constat partagé. C'est un premier pas indispensable. Mais il faudra passer ensuite du constat à l'action et surtout ne pas exclure, pour corriger des déséquilibres insupportables et destructeurs, l'adoption de mesures de correction destinées à compenser des avantages prohibitifs, notamment en matière de coût du travail.
Et là encore, il faudra remettre de l'ordre dans la maison européenne. Il faudra notamment remettre en cause la politique de la concurrence telle que la pratique la Commission européenne. Cette politique est devenue une sorte de butte témoin d'une idéologie dépassée et nocive et elle a pour principal effet d'empêcher nos entreprises et nos Etats de conduire une politique industrielle européenne offensive.
Monsieur le Premier ministre, c'est un défi considérable que votre gouvernement doit relever. Le Président de la République a indiqué l'enjeu : « si le G20 d'après crise ne s'attaque pas aux réformes structurelles dont le monde a besoin, il perdra sa légitimité ».
Je souhaite à votre gouvernement de faire triompher la coopération, pour que notre monde multipolaire ne soit pas livré demain à la seule compétition.
Le Président de la République a été très clair le 16 novembre : « il faut protéger les gens. On ne peut plus vivre dans un monde sans régulation. C'est la vocation de la France de porter le discours de la régulation ».
La crise de 2008 a révélé la faillite d'une libéralisation sans limites et le rôle irremplaçable des Etats. Dans l'urgence, mais sans traiter les problèmes de fond, ils ont empêché la débâcle du système financier international et inventé le G20, qui doit désormais les traiter.
Il s'agit bien de corriger les désastres entraînés par l'idéologie de la dérégulation, triomphante depuis les années 1970, et dont l'Europe a été la première victime. Elle a pris de plein fouet la conjonction de l'émergence des nouvelles puissances du Sud Est asiatique et des effets économiques et sociaux de la dérégulation. Elle est donc intéressée au premier chef par la correction de trajectoire à laquelle va s'atteler la présidence française.
Dans les trois domaines principaux où celle-ci est appelée à intervenir, la situation se présente différemment. La régulation du système financier mondial est en marche depuis le sommet de Pittsburg. L'idée de récréer un système monétaire international gagne du terrain. En revanche, la réforme du système du commerce international se heurte encore à d'importantes résistances idéologiques.
S'agissant du système financier mondial, la faillite de Lehman Brothers a conduit à une révision déchirante du mouvement de libéralisation systématique lancé dans les années 1980, remplacé par un processus de remise en ordre des marchés. Un certain nombre de pas ont été accomplis : beaucoup de progrès restent à faire, notamment pour soumettre les énormes transactions de gré à gré à la surveillance de régulateurs fiables. Beaucoup reste à faire, mais le processus est enclenché.
En ce qui concerne la réforme du système monétaire international, avec beaucoup de courage et peut-être de témérité, le chef de l'Etat et votre gouvernement entendent en faire la priorité de la présidence française. Là également, il s'agit d'introduire un changement de cap radical par rapport à l'idéologie de la non régulation, au non système monétaire international dans lequel nous vivons – mal – depuis 1971 et la fin de la convertibilité du dollar en or. Là encore, c'est l'Europe qui pâtit le plus de l'effet de ciseau entre une surévaluation tendancielle de l'euro et une sous-évaluation recherchée du dollar et du yuan. Nous sommes les témoins quotidiens des efforts héroïques de nos entreprises pour dégager des marges de productivité qui sont aussitôt annihilées à l'export par l'écart euro-dollar.
Le sommet de Séoul a commandé au FMI des analyses. A partir de là, il faudra que le gouvernement français porte des propositions audacieuses, par exemple l'idée d'un serpent monétaire international limitant les fluctuations entre devises, dont la France avait été le promoteur en Europe avec le SME.
Il faudra, si l'on veut réellement avancer, que l'Europe mette de l'ordre dans sa propre maison. Cela implique de modifier substantiellement la gestion de l'euro pour l'adapter à l'hétérogénéité des Etats membres, en reconnaissant que l'euro ne correspond pas à une zone monétaire optimale. Cela implique également de définir un nouveau système monétaire européen coopératif pour associer les autres devises ayant cours dans l'Union européenne.
Sans cela, l'Europe restera une zone d'instabilité monétaire, ce qui affectera évidemment sa crédibilité en tant que porteur de réforme.
Enfin, s'agissant de la nécessité de revenir sur la dérégulation du commerce international, là des résistances idéologiques demeurent, en particulier au niveau des institutions européennes. Le libre échangisme naïf qui a amené les Européens à se faire les avocats inconditionnels des accords de Marrakech reste encore prégnant, malgré leurs effets dévastateurs sur notre tissu économique.
Ailleurs, les esprits ont davantage évolué. Les Etats-Unis n'ont plus le déficit heureux. Ils ont même proposé à Séoul son plafonnement, ainsi que celui des excédents des comptes courants : une proposition sans doute difficile à mettre en œuvre, mais l'idée est lancée.
Il a été décidé à Séoul de définir des instruments de mesure pour parvenir à un constat partagé. C'est un premier pas indispensable. Mais il faudra passer ensuite du constat à l'action et surtout ne pas exclure, pour corriger des déséquilibres insupportables et destructeurs, l'adoption de mesures de correction destinées à compenser des avantages prohibitifs, notamment en matière de coût du travail.
Et là encore, il faudra remettre de l'ordre dans la maison européenne. Il faudra notamment remettre en cause la politique de la concurrence telle que la pratique la Commission européenne. Cette politique est devenue une sorte de butte témoin d'une idéologie dépassée et nocive et elle a pour principal effet d'empêcher nos entreprises et nos Etats de conduire une politique industrielle européenne offensive.
Monsieur le Premier ministre, c'est un défi considérable que votre gouvernement doit relever. Le Président de la République a indiqué l'enjeu : « si le G20 d'après crise ne s'attaque pas aux réformes structurelles dont le monde a besoin, il perdra sa légitimité ».
Je souhaite à votre gouvernement de faire triompher la coopération, pour que notre monde multipolaire ne soit pas livré demain à la seule compétition.