Dilemme ! Faut-il profiter de ces conditions de glisse qui restent tout de même assez techniques et plutôt sollicitantes pour aligner les milles comme un TGV ou rester prudent lorsque la mer n’est pas encore bien régulière et se consacrer à la maintenance du matériel et à la conservation de l’énergie du skipper pour les jours à venir ? C’est la question qui se pose aux vingt-cinq solitaires encore en course, puisque Rémy Andréan (Soleto) a démâté la nuit dernière… Une information qui a forcément fait le tour de la flotte par radio VHF interposée et il faut imaginer que la diffusion du bulletin météo par la Direction de Course ainsi que le classement par rapport au but, ont dû changer un peu la perception des solitaires selon l’état de leur bateau et la fatigue accumulée au bout de trois jours et trois nuits de mer. Et comme les prévisions sont encore assez musclées jusqu’à lundi soir en raison du passage d’une dépression qui se décale sur l’Irlande, il faut savoir gérer le temps, donner du rythme quand la mer est maniable (même s’il peut y avoir plus de cinq mètres de creux) et que le vent s’est stabilisé, et faire le dos rond en préservant le matériel sans pour autant réduire trop la toile…
Laisser passer le frontCar cette journée de dimanche a été marquée par le passage d’un front froid, et donc d’un renforcement jusqu’à trente nœuds et plus sous les rafales d’une brise de secteur Ouest à Sud-Ouest : des grains, une mer plus croisée difficile à négocier sous pilote, des vagues qui secouent le gréement, des trajectoires à la barre qui doivent composer avec les éléments… L’objet était avant tout de passer sans encombre en attendant que tout se régularise, ce qui va se faire progressivement lorsque le ciel de traîne va lisser la mer et calmer la brise. Il y aura encore plus de vingt-cinq nœuds sur la route ces prochaines heures mais la nuit prochaine devrait montrer que les solitaires vont de nouveau accélérer le tempo. Certains l’ont déjà fait à l’image du vainqueur de la première étape, Francisco Lobato (Looking for…) qui a aligné plus de 210 milles en 24 heures et qui pourrait bien friser les dix nœuds de moyenne les heures prochaines pour faire le break. Il a d’ailleurs profité des problèmes de bout dehors du leader actuel, Stéphane Le Diraison (Cultisol-Institut Curie), pour revenir à une quinzaine de milles…
Toute la flotte est désormais au dessus de la route directe et les plus extrêmes au Nord comme le Britannique Oliver Bond (Base Camp), très rapide ces dernières heures, sont même déjà au dessus de la latitude du cap Finisterre. Un golfe de Gascogne qui n’est plus qu’à 400 milles et qui devrait être beaucoup plus maniable dès la pointe de la péninsule ibérique franchie. Il y a donc encore du match entre les dix premiers voiliers de série, même si le comportement et la trajectoire du Portugais laisse entendre qu’il a désormais pris l’ascendant et ne le lâchera pas. Et parmi les prototypes, si le leader actuel marque le pas suite à ses soucis techniques, il va devoir faire attention au retour de Sébastien Stéphant (Déphémèrides) qui dispose d’un vieux prototype certes, mais très rapide dans ces conditions de vent portants. Le Trinitain devrait d’ailleurs dépasser Sébastien Picault (Kickers) dans la nuit si on en juge par sa vitesse moyenne, l’une des plus élevées de la flotte.
Démâtage nocturnePour Rémy Andréan (Soleto), la course est belle et bien finie car son mât s’est écroulé aux approches de minuit samedi : « A 23h15, j’étais dans ma cabine, le bateau sous gennaker et grand voile à un ris : je dormais et j’ai été réveillé par un crac… Je suis monté sur le pont pour constater que le mât était par terre. J’ai fait le tour du bateau et j’ai déduit que le démâtage était dû à une rupture du pataras bâbord. J’ai passé cinq heures pour récupérer mon mât et ma grand voile mais pas mon gennaker. La rupture a eu lieu au dessus de la liaison des bas haubans (au dessus du premier étage de barre de flèche). Dehors c’est propre, je me suis donc reposé et j’ai mangé. J’avance pour l’instant à deux noeuds dans le 80°. Il reste environ deux mètres de mât, et l’idée est de remettre l’autre partie du mât à la place pour gagner en vitesse, si elle est en bon état… » Le voilier accompagnateur Maya était sur zone dans l’après-midi de dimanche afin d’aider le skipper à monter un gréement de fortune. Vu que la brise est portante et sous grand voile à trois ris et tourmentin, Rémy Andréan va rallier un port espagnol, entre Vigo et La Corogne.
Classement des prototypes du dimanche 17 août à 15h00 1-Stéphane Le Diraison (Cultisol-Institut Curie) à 723 milles de l’arrivée
2-Sébastien Picault (Kickers) à 25,5 milles du leader
3-Sébastien Stéphant (Déphémèrides) à 26,4 M
4-Arnaud Vasseur (Nat’Che) à 20,7 M
5-Pierre Rolland (D2-Marée Haute) à 47,9 M
Classement des voiliers de série du dimanche 17 août à 15h00
1-Francisco Lobato (Looking for…) à 738,6 milles de l’arrivée
2-Riccardo Apolloni (Ma vie pour Mapei) à 14,2 M
3-Charlie Dalin (Antalis) à 16,4 M
4-Jérôme Lecuna (I feel good) à 20,1 M
5-Oliver Bond (Base Camp) à 20,4 M
Info presse www.lessables-lesacores.com