Pour la troisième marche…
Comme Roland Jourdain avant les Açores, Marc Guillemot a donc réduit la toile et remplit tous ses ballasts au vent pour alourdir le bateau et lui donner plus de stabilité. En fait, la dépression qui va balayer la Vendée la nuit prochaine et mardi matin, est loin devant Safran qui n'avait plus qu'une quinzaine de nœuds de vent de Nord-Ouest sur une mer qui s'assagissait. Pour l'instant, le navigateur essaye toujours de faire route vers Les Sables d'Olonne pour finir le parcours et être classé : les simulations laissent entendre que le solitaire pourrait atteindre le but en fin de week-end ou en début de semaine, selon les pièges météorologiques de l'Atlantique…
Et pendant ce temps, Samantha Davies (Roxy) s'est aussi fait sérieusement brasser au large des Açores lors du passage d'un front très actif avec une mer déferlante et de grosses rafales à plus de cinquante nœuds. La Britannique était ce lundi après-midi à moins de 1 000 milles de l'arrivée et devait repasser devant Marc Guillemot avant la nuit. Reste à savoir si la navigatrice pourra finir avec plus de 50 heures de marge pour l'acquisition de la troisième marche du podium… puisque les deux solitaires ont été redressés, Marc avec 82 heures de bonus, Samantha avec 32 heures. Mais l'Atlantique réserve encore des rebondissements car après cette tempête dans le golfe de Gascogne, l'anticyclone des Açores s'installe pile sur la position des deux skippers… De quoi faire une pause sur Safran après ces journées harassantes pour Marc Guillemot et de quoi tenter une échappée pour Sam Davies !
Un laborieux final
Pour les deux autres Britanniques qui poursuivent les deux prétendants au podium, la situation ne va pas être des plus simples : justement avec ces hautes pressions qui vont bloquer le passage entre les Açores et le golfe de Gascogne… Brian Thompson (Bahrain Team Pindar) et Dee Caffari (Aviva) vont probablement devoir incurver leur route vers le Nord-Nord Est pour éviter les calmes anticycloniques. Leurs estimations d'arrivée oscillent entre lundi matin et mercredi soir, alors que Samantha Davies est plutôt attendue entre jeudi après-midi et vendredi soir ! Alors que pour Arnaud Boissières, ce déplacement des hautes pressions est plutôt une bonne nouvelle : dès mardi, le skipper de Akéna Vérandas va enfin quitter des alizés d'Est pour un bon flux de Sud-Ouest. Il devrait pouvoir grignoter des milles sur Brian et Dee.
Et avec un peu de chance (enfin !), Steve White ne va pas naviguer trop longtemps au près : lui aussi va voir les alizés de Nord-Est s'incurver vers le Sud, puis le Sud-Ouest à la latitude des Canaries, mais il lui faudra auparavant, traverser une zone de transition avec des vents faibles. Rich Wilson (Great American III) progresse lui aussi dans des alizés d'Est, mais dans l'hémisphère Sud : l'Américain a encore 1 300 milles avant de franchir l'équateur… Quant à Raphaël Dinelli (Fondation Océan Vital), la dépression qui l'a cueillie après les Malouines a été dure à vivre : plus de cinquante nœuds contraire, ce n'est pas très agréable mais le vent est ce lundi après-midi devenu portant et nettement moins musclé. Les conditions de navigation sont à peu près les mêmes pour Norbert Sedlacek (Nauticsport-Kapsch) car l'Autrichien sort enfin des mers du Sud.
Marc Guillemot (Safran) lors d'une vacation spéciale à 16h30 : « Ce qui s'est passé est la conséquence, je pense, d'une vieille histoire. Sous les Kerguelen, j'avais cartonné un gros mammifère marin. J'étais passé d'un coup de 20 à 0 nœud. Et depuis quelque temps, j'avais l'impression que la quille donnait des coups de raquette. Ça s'est amplifié après les Açores. Et hier, la quille a commencé à se balader d'avant en arrière. Sous les conseils de Guillaume Verdier (architecte du bateau avec VPLP), j'ai sécurisé tout ça pendant une bonne partie de la nuit avec un système de brélage qui passait par le pont et qui était repris sur le winch au pied de mât. Je suis arrivé à bloquer la quille et j'étais content de mes finitions. Quand j'ai tout terminé il y a quelques heures, je suis allé à l'extérieur pour retendre le brélage et là, j'ai été étonné de voir que ça montait très haut. Quand je suis revenu à l'intérieur, j'ai constaté que tout était parti. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, j'ai dit 'ouf'. Parce qu'avoir un pendule de trois tonnes qui se ballade 4,5 mètres sous l'eau, c'est terrible. On sait qu'on risque de tout casser. Une fois que la quille est tombée, j'étais soulagé. J'avais déjà rempli mes ballasts et préparé ma sécu. Sans la quille, c'est moins tressant, vous ne pouvez pas vous imaginer ! En ce moment, j'ai tous les ballasts au vent remplis. Je dois avoir 5 à 6 tonnes d'eau qui me permettent de tenir en équilibre. Je suis sous trois ris et foc de route, je marche à 10/11 nœuds. La mer est encore relativement agitée, mais le vent est bien descendu, je dois avoir 12 à 15 nœuds. Pour l'instant, je continue ma course. J'ai vraiment, vraiment envie d'arriver aux Sables d'Olonne. Pour la troisième place, ça risque d'être bâché mais je veux finir, quelle que soit ma position à l'arrivée… Je suis un peu rincé. Tout cela a demandé beaucoup de travail toute la nuit et ce matin… et vous imaginez le 'bronx' dans le bateau : j'ai déjà passé 2h30 à nettoyer et ce n'est pas fini… »
Le classement de 16 heures le 09/02/09
1- Michel Desjoyeaux (Foncia) arrivé aux Sables d'Olonne après 84j 03h 09'
2- Armel Le Cléac'h (Brit Air) arrivé aux Sables d'Olonne après 89 jours 9 heures 39 minutes et 35 secondes de course (après déduction de ses 11 heures de bonification)
3- Marc Guillemot (Safran) à 975,7 milles de l'arrivée
4- Samantha Davies (Roxy) à 982,2 milles de l'arrivée
5- Brian Thompson (Bahrain Team Pindar) à 1579,9 milles
6- Dee Caffari (Aviva) à 1626 milles
7- Arnaud Boissières (Akena Vérandas) à 2239,2 milles
8- Steve White (Toe in the water) à 2977 milles
9- Rich Wilson (Great American III) à 4527,3 milles
10- Raphaël Dinelli (Fondation Océan Vital) à 5622,6 milles
11- Norbert Sedlacek (Nauticsport-Kapsch) à 6038,3 milles
RDG Vincent Riou (PRB), réparation accordée, classé 3e