Sa descente de l'Atlantique sud continue et signe prémonitoire, Marc passe à proximité de l'île Gough où il se retrouve en grande conversation avec une scientifique en séjour sur l'île. Ce ne sera pas sa dernière rencontre. Le 11 décembre commence la litanie des incidents de mer qui vont transformer sa course en une longue bagarre contre un destin contraire. Ce jour-là il heurte violemment un cétacé et brise sa dérive tribord. Il ne sait pas que sa quille a aussi été endommagée dans le choc. Le 16, c'est son rail de chariot de grand-voile qui s'arrache en partie lui imposant de naviguer avec au minimum deux ris dans la grand-voile.
Drôle d'endroit pour une rencontre
Le 18 décembre, la course de Marc bascule. Alerté par la direction de course, il apprend que Yann Elies vient de se briser la jambe, qu'il est à bord de son Generali et qu'il ne peut pas bouger. En accord avec la direction de course, le navigateur trinitain se déroute immédiatement : il sait ce que Yann endure car il a connu la même situation quelques vingt années plus tôt quand il avait dû attendre les secours à bord de Jet Services IV, le bassin fracturé, après le chavirage du catamaran. Pour Marco, il n'y a pas l'ombre d'une hésitation : il ira à la rencontre de Yann et mettra en œuvre tout ce qu'il pourra tant que les secours australiens n'auront pas pris en charge son camarade. Pendant des heures, Marco va tourner autour du bateau de Yann, l'encourageant à la VHF, tentant de lui jeter par l'ouverture de la cabine les calmants dont Yann a besoin et qu'il ne peut pas atteindre. Son soutien psychologique sera essentiel et est sûrement à l'origine du sursaut de volonté de Yann qui dans un effort intense parviendra à attraper ses calmants, un peu de nourriture et un peu d'eau. Marco ne reprendra la course qu'une fois que la frégate australienne aura embarqué à son bord le navigateur de Generali. Mais on imagine à quel point il est difficile de revenir dans une partie quand on est resté sur le banc de touche à assister un copain blessé. Malgré tout, Marc continue de se battre : il s'arrêtera une première fois à l'île d'Auckland, à plusieurs centaines milles dans le sud de la Nouvelle-Zélande pour tenter de réparer son mât, sous le regard ébahi de deux scientifiques venus procéder à des travaux d'études sur la plage. Il récidivera dans l'archipel des Malouines, à Port Stanley, sous les yeux de centaines de touristes venus visiter les coins perdus des mers du sud en paquebot. Au bout du compte, Marc Guillemot est bien le navigateur solitaire qui aura fait le plus de rencontres dans ce Vendée Globe.
Et puis viendra la perte de sa quille à presque mille milles du but : les conditions météos rencontrées ne sont pas trop défavorables, le dernier mauvais temps vient de passer. Son compagnon Roland Jourdain a montré en quelque sorte le chemin en parcourant les 600 milles qui le séparait des Açores sans son appendice. Si d'autres l'ont fait, pourquoi pas lui. Il décide de continuer, affirme haut et clair qu'il est toujours en course, toujours à la lutte pour le podium. Il n'est pas de la trempe de ceux qui renoncent aux moindres vents contraires.
Une fois la ligne d'arrivée, Marc s'était fait une promesse : celle d'inviter à son bord d'autres navigateurs qui n'avaient pas eu la chance de pouvoir boucler l'aventure. Pour remonter le chenal, il a demandé la compagnie de Jean Le Cam, Roland Jourdain, Kito de Pavant et Yann Elies. Les quatre navigateurs seront à ses côtés, Yann restant dans une embarcation pneumatique bord à bord avec Safran. Qu'il s'agisse de surmonter des défis ou de partager ses bonheurs, décidément, cet homme a un gros cœur.
Le classement de 16 heures
1- Michel Desjoyeaux Michel Desjoyeaux (Foncia) le 1 février à 16h11
2 - Armel Le Cléac'h (Brit Air) le 7 février à 9h41
3 - Sam Davies (Roxy) le 14 février à 1h41
4 - Marc Guillemot (Safran) à 70,4 milles de l'arrivée
5 - Brian Thompson (Bahrain Team Pindar) à 36,1 milles du premier
6 - Dee Caffari (Aviva) à 69,2 milles du premier
7 - Arnaud Boissières (Akena Vérandas) à 1200,9 milles du premier
8 - Steve White (Toe in the water) à 1740 milles du premier
9 - Rich Wilson (Great American III) à 3264,7 milles du premier
10 - Raphaël Dinelli (Fondation Océan Vital) à 4500,2 milles du premier
11 - Norbert Sedlacek (Nauticsport-Kapsch) à 4892,2 milles du premier
3 - Vincent Riou (PRB) - réparation accordée