Les remises de prix ont des vertus symboliques insoupçonnées. Au delà des récompenses et des gratifications des bons élèves, elles sonnent aussi la fin d’un épisode et permettent enfin de se projeter dans l’avenir. Celle de mardi soir, sur la terrasse de l’hôtel Faial, n’a pas dérogé à la tradition. Elle offrait ainsi une dernière opportunité de revivre les grands moments de ces quelques sept jours de mer, d’échanger entre concurrents avant que chaque équipage ne rentre dans sa bulle.
Changement d’ambiance dès le mercredi matin : on reste courtois, on ne s’évite pas, mais on sent bien que chacun a besoin de retrouver une part de cette intimité qui n’appartient qu’aux navigateurs. La fresque entamée lundi a pu être achevée aujourd’hui, une fois le soleil retrouvé. Chacun est venu ensuite apposer sa signature, en respect de la tradition. Une pause, une respiration avant de retourner préparer le bateau : ici chaque équipier a ses marottes qu’il faut s’efforcer de respecter sous peine de déstabilisation psychologique, le rangement du matériel et de l’avitaillement permet de s’accrocher à des détails très pratiques, de réfléchir à la stratégie qu’on s’efforce d’élaborer… Deux concurrents ne prendront pas le départ de cette deuxième étape : Yves Ecarlat (Vale Inco Nouvelle Calédonie) dont l’équipier a dû rentrer se faire hospitaliser en France et Gonzalo Botin (Tales), du fait des réparations à effectuer sur ses safrans.
Chacun sa route…
Les dernières prévisions météorologiques laissent entendre que le retour pourrait être plus rapide que prévu. Le flux d’ouest qui s’installe au nord du 42ème parallèle devrait ensuite propulser la flotte à vive allure vers les Sables d’Olonne. La seule incertitude consiste à savoir comment monter dans le train des dépressions océaniques, quand les barbules de vent s’alourdissent de traits supplémentaires sur les fichiers de prévisions. Faudra-t-il monter dans le nord au risque de rallonger sa route de manière inopportune, gagner dans l’est pour échapper aux pièges de l’anticyclone qui ne manque pas de se reformer sur l’archipel ou assumer une part de pusillanimité, en jouant les voies médianes ? C’est peut-être ici que réside la clé de la réussite sur cette deuxième étape. Pour le reste, il va falloir être prêt à faire de la vitesse, à passer de longues heures à la barre quand le bateau surfe sous spinnaker sur la houle du large. Eviter de se laisser griser par des longues glissades qui, au bout du compte, finissent par rallonger la route, mais s’en tenir à la stricte comptabilité des vitesses moyennes de rapprochement, autrement plus parlantes. Alors on échafaude des scénarios, on fait tourner les logiciels de routage en forçant des points de passage obligés, on élabore un plan B au cas où les choses ne tourneraient pas comme on le souhaite… Trop d’introspection peut entrainer parfois des revers de fortune : heureusement pour eux, les navigateurs de Horta – Les Sables vont devoir se plonger rapidement dans le concret à mesure qu’approchera l’heure de rejoindre la ligne de départ. Le Pico n’est pas le Popocatépetl et personne ne souhaite suivre les routes erratiques du vice-consul.