Pourtant, jamais une course n'avait vu autant de cadors affûtés déflorer la ligne de départ le 9 novembre dernier. Sur les trente partants, dix-sept ne termineront pas. Seize ont été victimes d'avaries, (dont six démâtages) qui ne sont pas seulement dues à des problèmes purement mécaniques, mais aussi à la malchance, ou à un enchaînement d'événements malencontreux comme les objets flottants rencontrés par Jean-Pierre Dick et Jean Le Cam, la déferlante qui a couché BT ou le naufrage de Cheminées Poujoulat aux Kerguelen. Un seul (Yann Eliès) a été évacué sur blessure et depuis mercredi soir, c'est au tour de Vincent Riou, d'être frappé par le sort.
Joint ce matin à la vacation pendant que PRB arrivait (à 10h30) en remorque à Puerto Williams, un port militaire chilien situé dans le canal de Beagle (au sud de la Terre de Feu), Vincent avait la voix fanée, trahissant fatigue morale et sentiment d'injustice. Depuis hier si heureux d'avoir réussi à récupérer son ami Jean Le Cam, au prix d'une manœuvre périlleuse, le vainqueur du Vendée Globe 2004 réfléchissait déjà à l'avenir, avec comme seul objectif : réparer son gréement et terminer sa course au Sables d'Olonne
Paradoxalement, cette succession de funestes péripéties renforce le sentiment de privilège d'être encore en course. Même Raphaël Dinelli, dernier à plus de 6 300 milles des leaders, savourait cette journée calme et ensoleillée au large de la Nouvelle-Zélande, malgré ses soucis techniques et la récente tentation de s'arrêter définitivement en Australie. En troisième position avec un océan d'avance, Armel Le Cléac'h, dans une vidéo envoyée mercrerdi, ne cachait pas son immense plaisir de doubler pour la première fois de sa vie le cap Horn. La rayonnante Samantha Davies qui a cassé (et réparé) son hâle-bas de grand-voile et beaucoup bricolé sur le pont de Roxy, devrait franchir à son tour le fameux cailloux, ce week-end. On imagine déjà la satisfaction de la navigatrice anglaise actuellement pointée dans le top 5. Arnaud Boissières, lui, trouvait son bonheur dans la bagarre qui l'oppose depuis de nombreuses semaines à Dee Caffari, malgré un déficit de vitesse à bord de son " vieux " bateau. Bref, malgré les galères et les coups du sort, percent toujours de brefs moments d'euphorie ou de soulagement.
Et que dire du réjouissant duel qui se trame au large de l'Amérique du Sud ? Aux commandes depuis maintenant 23 jours, Michel Desjoyeaux progresse comme une mécanique bien huilée. Même si le skipper de Foncia déplore quelques bricoles à réparer, il demeure sûr de ses choix stratégiques et serein dans sa navigation. C'est la voix claire et déliée qu'il répondait ce jour à la vacation, sans trop s'inquiéter - apparemment - de la trajectoire de son adversaire Bilou, décalé de 250 milles dans son Ouest. Pourtant, la situation est loin d'être limpide devant les étraves de Veolia Environnement et Foncia, avec un immense anticyclone de 900 milles, en formation au large de l'Uruguay. Sainte Hélène, priez pour eux !
Les premiers au pointage de 16 heures le 08/01/09 :
1- Michel Desjoyeaux (Foncia) à 5956,4 milles de l'arrivée
2- Roland Jourdain (Veolia Environnement) à 123,5 milles du leader
3- Armel Le Cléac'h (Brit Air) à 768,8 milles
4- Vincent Riou (PRB) à 1043,4 milles
5- Samantha Davies (Roxy) à 1942,9 milles