Pour un tel projet, il fallait une arrivée atypique. Parvenu au terme de sa course dans les temps souhaités, Bertrand de Broc a néanmoins été cueilli par un grain d’une violence extrême à son arrivée dans le chenal. Plus de 40 nœuds de vent, une pluie battante, n’ont pas eu raison des spectateurs massés sur les quais qui, stoïques, ont voulu saluer l’arrivée du marin de Sainte-Marine.
Une heure plus tard, Bertrand se présentait sur le podium de la course, puis en salle de conférence de presse où près d’une heure durant, il répondait aux questions des journalistes et du public.
La genèse du projet
« Même moi je n’y croyais pas trop. Mais au salon nautique il y a un an et demi, j’avais rencontré les gens de la communication du Vendée Globe en leur disant que j’essayais de monter un projet, certes tardif et sans savoir comment m’y prendre. Puis le 21 janvier, à l’anniversaire d’un ami, est revenue l’idée de Votre Nom autour du Monde. Et j’ai annoncé à la presse que je repartais le 23 janvier. Je ne sais pas comment ça s’est fait, mais on a fait des rencontres dans tous les sens et ça s’est fait. Je pense que les choses devaient se faire. »
Au bout du Vendée Globe
« C’est extraordinaire de se dire qu’on va remonter le chenal, profiter des bons moments, se faire plaisir et faire plaisir aussi. Je suis content, car tout le monde est content. Quand on a la chance de pouvoir participer à cette épreuve, qu’on arrive à le faire et qu’on la termine... Remonter ce chenal après avoir fini la course oui, c’est la première fois. Car je l’avais déjà emprunté sur d’autres courses. (rires) Mais le chenal, bien qu’on ait été arrosés, est un moment assez sympa. Ça se mérite, il faut faire le tour. Et ça, c’est fait. »
Sa course
« Le Vendée Globe, pour moi, c’est vraiment un challenge. Ce n’est pas juste un tour du monde en solitaire, il faut aller vite, on use le matériel. C’est une course. Il ne faut pas casser, il faut gérer le bonhomme et le bateau. C’est pour ça que cette course me plaît. J’avais inscrit la phrase des instructions de course dans le bateau : « Départ des Sables d’Olonne et retour aux Sables d’Olonne ». Et on l’a fait, avec un temps plutôt correct en plus. J’ai le 13ème meilleur temps autour du monde, le 11ème sur le Vendée Globe. C’est pas mal non ? »
L’évolution de la course
« La course a changé. Elle est devenue plus professionnelle, il y a tout un travail d’équipe derrière. Avant on entendait les autres concurrents à la vacation, quand il fallait passer par Saint-Lys Radio. On savait tout. Mais tout change. C’est une autre épreuve aussi, avec les portes des glaces. Mais c’est une question de sécurité des concurrents. C’est plus rassurant, mais ça change la configuration de la course. Elle devient un peu plus tactique pour les régatiers qui font de bonnes trajectoires. Avant on étudiait plus la météo à long terme. C’était aussi à celui qui descendait le plus au sud. »
Bricolage permanent et préparation physique
« J’ai eu pas mal de bricoles sur le bateau : des problèmes de pilote notamment où je me suis retrouvé plusieurs fois avec le bateau parti au tas. J’entendais le pilote bipper et en sortant je voyais le bateau sur la tranche. Mais petit à petit, il a mieux marché. Il a dû se dire qu’il allait me mettre en colère. Mais c’est aussi comme ça que je me suis rendu compte que c’est un bateau extrêmement solide. Autrement, j’ai réalisé que je n’étais pas assez prêt physiquement, je m’étais un peu négligé en cherchant mes sponsors. Les deux premières semaines, j’ai souffert. Là, aujourd’hui, je pourrais partir faire un Vendée Globe. Peut-être qu’un jour on fera deux tours ! »
Des projets pour l’avenir
« J’avais une idée mais François Gabart m’a un peu coupé l’herbe sous le pied. Je voulais monter un grand bateau pour faire le tour du monde en moins de 80 jours sur un grand monocoque. Peut-être en équipage. Je ne sais pas, c’est peut-être encore faisable. Sinon il y a aussi la Transat Jacques Vabre et la Route du Rhum dans deux ans, une course que je n’ai pas encore finie. Je l’ai faite deux fois mais les deux fois j’ai abandonné. Celle-ci j’aurai le temps de bien la préparer, ça peut être pas mal de m’engager. »
Des images plein la tête
« Juste après le cap de Bonne Espérance, je sors et je vois des milliers de dauphins. Je n’avais jamais vu ça, d’habitude on en voit 10, 20 ou 30. Là j’avais un champ. J’ai voulu prendre une photo mais je n’avais pas la carte dedans. J’ai donc pris la caméra pour filmer ce ballet de dauphins. Autre bon souvenir, mon passage entre le 12e sud et l’équateur : on est tous les soirs sous la pleine lune, le bateau glisse. On met de la musique, on sort du schéma du sud où il y a du bruit sans arrêt. Et quand on se fait deux ou trois jours comme ça, sur une mer lisse avec des bateaux qui avancent à 10-12 nœuds c’est fabuleux. Ce sont de sacrées machines, c’est déjà quelque part une chance de pouvoir naviguer là-dessus. »