Il peut commencer à regarder dans son sillage et mesurer la portée de ce qu’il est train d’accomplir. Avec 110 milles d’avance sur ses plus proches poursuivants, Bertrand Delesne n’est pas tout à fait sur la même planète que les autres. Et pourtant, certains ne laissent pas leur part au chien puisque la grande majorité de la flotte des prototypes tourne au dessus des dix nœuds de moyenne. Ce qui signifie que tout ce petit monde est constamment au planning, glissant sur les crêtes de vagues pour essayer d’attraper surf sur surf. Ce qui n’exclut pas quelques considérations stratégiques : au nord, Thomas Normand (Financière de l’Echiquier) préserve pour l’heure sa deuxième place de l’étape. Le retour annoncé des vents au secteur nord devrait lui permettre de bénéficier d’un meilleur angle pour descendre sur les Sables d’Olonne. Sur la route directe Vincent Barnaud (NorthStar), Véronique Loisel (De l’espace pour la mer) et Sébastien Picault (Kickers) se livrent à une course de vitesse pure, quand au sud Jörg Riechers (Mare.de) et Lucas Montagne (ONG Conseil) tentent de se recaler en profitant de la pression retrouvée. Autant dire une navigation sur la corde raide, où le moindre écart de conduite peut se payer en milles parcourus ou en perte de vitesse. Problèmes de riches pourront dire les attardés qui pointent pour les derniers à 450 milles du leader, soit plus de deux jours de mer. Mais Hugues Chollet (Dizikilepti) sur un prototype datant de 1992 ou bien encore Pascal Chombart de Lauwe (Xanlite) ou Benoît Lenglet (Evasol) sur leurs deux Nacira 6,50, appelés à devenir bateaux de série, savaient d’entrée qu’ils n’avaient pas les mêmes arguments que la tête de flotte. Pour eux, l’essentiel est bien de traverser en toute sécurité.
Le facteur est néerlandais
En série, Rémy Andréan (Soleto) tout comme Marc Dubos (Cepat) peuvent déjà se réjouir de laisser derrière eux quelques prototypes. Savoir durer fait aussi partie de la course. Jusque là toute la flotte se livrait à une course de vitesse dans le sillage de Xavier Macaire (Starter) toujours aussi solide leader. Jean-Marc Allaire (Baker Tilly AG2R La Mondiale) tient toujours tête à Amaury François (amauryfrancois.com). Mais on sait que Jean-Marc, comme Xavier, est issu de l’école du dériveur olympique. Ces deux-là ont la réputation de barrer beaucoup et de savoir par là même tirer le meilleur du potentiel de leur bateau. Seul concurrent à choisir de se démarquer de l’ensemble du groupe, Robert Rosenjacobson (NED 602) qui, à la faveur d’un recalage dans le nord, tente un dernier coup de poker pour essayer d’accrocher le podium. La journée de demain est annoncée comme difficile pour les concurrents positionnés les plus au sud et il se pourrait bien que Robert cherche à bénéficier de conditions plus favorables pour les derniers milles. Réponse demain soir lundi pour savoir si le retour sur investissement a été profitable. Avec une trentaine de milles d’avance sur Davy Beaudart (Innovea Environnement), le skipper néerlandais sait qu’à la régulière, il ne pourra pas précéder le leader de la première étape, sur lequel il possédait dix heures de retard à l’arrivée à Horta. Seul un coup météo qui lui permettrait de passer dans un trou de souris, peut encore le faire espérer. Robert a beau être le doyen de la flotte, il n’en a pas moins gardé un esprit de compétition acéré pour tenter ce qu’on appelle en régate, un dernier bord du facteur. Perdre ou gagner, qu’importe, ce qui compte, c’est le panache.