L'échappée d'Alex Thomson
Au moment d'aborder le Pot au Noir, le dilemme pour les skippers lundi matin était de choisir entre une route plein Sud, plus courte mais plus risquée sur le papier, ou alors d'effectuer un décalage dans l'Ouest pour chercher des vents théoriquement mieux établis. Fidèle à sa réputation, Thomson n'a pas hésité à prendre des risques en choisissant la première option. Ses poursuivants sont partis vers l'Ouest, davantage par contrainte que par choix. A 5h ce matin, Alex Thomson avait 32 milles d'avance sur son premier poursuivant, Sébastien Josse (Edmond de Rothschild). Dix heures plus tard, l'écart au deuxième s'élevait à 87 milles. Un beau pactole qui pourrait bien s'accroître dans les heures à venir. Une image satellite fournie cet après-midi par Great Circle, le partenaire météo du Vendée Globe, indiquait en effet que le skipper d'Hugo Boss était sorti de la zone active des grains, quand ses poursuivants étaient encore en plein dedans…
Les premiers chasseurs du leader britannique comptaient sur le piège météo que constitue le Pot au Noir pour reprendre du terrain. Force est de constater que le scénario ne leur est pas favorable. Joint ce midi en vacation, Sébastien Josse se montrait philosophe. « Le vent a fait un tour à 360 degrés et là il y a 2 nœuds de vent. Je suis collé à la piste. Le ciel est sans couleur. Je n'arrive pas à distinguer d'où va venir le vent, s'il y a un grain ou pas. C'est la magie du Pot au Noir… On choisit une porte d'entrée et après il y a une forme de réussite. »
Sébastien Josse bataille avec Vincent Riou (PRB), Armel Le Cléac'h (Banque Populaire VIII), Paul Meilhat (SMA), Jérémie Beyou (Maître CoQ) et Morgan Lagravière (Safran). Entre ces marins, les classements sont à prendre avec des pincettes, les écarts se creusent ou se resserrent en fonction des grains et des calmes… Yann Eliès (Queguiner - Leucémie Espoir), lui, profite de l'effet tampon et se rapproche des sept premiers.
On le voit, l'incertitude demeure mais une chose semble acquise : le temps de référence à l'équateur va tomber. Détenu depuis 2004 par Jean Le Cam (en 10 jours et 11 heures et 28 minutes), il pourrait être amélioré d'une bonne journée.
Tanguy de Lamotte à Mindelo, tous les autres concurrents en course
Tanguy de Lamotte (Initiatives-Cœur) est arrivé cet après-midi à Mindelo, sur l'île de São Vicente (Cap-Vert), où il va tenter de trouver une solution pour réparer sa tête de mât cassée. A l'arrêt, Tanguy va pouvoir entreprendre les réparations qui lui permettront de reprendre sa course. Il ne manquera de nous donner de plus amples informations dans les prochaines heures. Les autres concurrents poursuivent leur parcours et sont passés ou s'apprêtent à passer à l'Ouest du Cap-Vert, à l'exception de Nandor Fa qui, comme Alex Thomson, tente le passage entre les îles.
C'était à prévoir : des matchs dans le match ne manquent pas de se mettre en place. Chacun peut se jauger, rares sont ceux qui naviguent sans une cible en ligne de mire. On peut ainsi se délecter de la lutte entre un vieux briscard du Vendée Globe, Jean Le Cam (Finistère Mer Vent), et un bizuth incisif, Thomas Ruyant (Le Souffle du Nord pour le Projet Imagine). Un peu plus en arrière, Arnaud Boissières (La Mie Câline), lui, part en chasse de Bertrand de Broc (MACSF) et Louis Burton (Bureau Vallée). Quant à Rich Wilson (Great American IV), Kojiro Shiraishi (Spirit of Yukoh) et Romain Attanasio (Famille Mary-Etamine du Lys), ils se tiennent en moins de 20 milles au large du Cap-Vert. Pot au Noir ou pas, on aurait tort de se focaliser uniquement sur le groupe de tête…
Ils ont dit :
Alex Thomson (Hugo Boss) :
« J'espère passer le moins de temps possible dans le Pot au Noir et c'est pour cela que je suis allé vers le sud, voire un peu vers l'est. Je regarde les nuages qui arrivent car je veux en sortir rapidement. Mais ce n'est pas une science exacte et il faut aussi compter sur un peu de réussite. J'espère être le premier à trouver un vent soutenu de l'autre côté. »
Sébastien Josse (Edmond de Rothschild) :
« Vu la largeur du Pot au Noir, je dois juste subir, j'avance à la vitesse d'un escargot. J'ai fait plus de changements de voiles que depuis le début de la course, et ce n'est pas fini ! C'est la magie du Pot au Noir... Même si je ne sors pas bien de cette zone, rien ne sera perdu. La course est longue, tout peut arriver. »
Paul Meilhat (SMA) :
« Ça se passe plutôt bien puisque j'ai bénéficié de vents assez forts pendant 5 heures. Cela m'a permis d'avancer. Mais je commence à sentir le vent qui retombe à nouveau... Je me prépare pour une nouvelle zone d'instabilité. J'ai réussi à me reposer un peu cette nuit. Ce matin c'était très physique car il y avait de grosses rafales dans les grains. Je pense m'extraire du Pot au Noir demain matin voire en fin de nuit. C'est mon premier Pot au Noir donc je suis en découverte. »
Arnaud Boissières (La Mie Câline) :
« Je suis passé près du Cap-Vert et j'ai pas mal été perturbé par le dévent. Je n'ai pas été très vite. J'ai fait beaucoup de changements de voiles mais cela n'a pas été très bénéfique. Je suis à la poursuite de Bertrand de Broc et Louis Burton. Ce sont des concurrents sympas qui naviguent sur des bateaux de la même génération que le mien. J'ai fait le compte ce matin, mon premier passage de l'équateur remonte à ma Mini Transat 2001. Sur ce Vendée Globe, ça sera mon dixième passage ! »
Louis Burton (Bureau Vallée) :
« On sent qu'il y a un super niveau de préparation sur les bateaux. Les conditions ont été vraiment top, du coup ça envoie. Depuis trois jours c'est l'autoroute. C'est assez dingue. Je suis en train de finir de passer le Cap-Vert. La mer s'est calmée, il y a 13 nœuds de vent et je fais cap au Sud. Avec Bertrand de Broc, nous avons navigué pendant une dizaine d'heures à vue, nous nous sommes parlés à la VHF deux ou trois fois. C'était plutôt sympa. Avec Bertrand, on ne se cache pas, il n'y a pas d'intox entre nous. On est suffisamment potes... »
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